Wheler, George (1675)

George Wheler
Date inventaire : 
1675

16 octobre 1675

Né en 1650 à Breda (Pays Bas) où ses parents royalistes anglais vivaient en exil, George Wheler reçoit son éducation dans le Kent et à Oxford. En 1673 il entame un voyage en France, Suisse et Italie où il est initié à l’archéologie par Jean-Foy Vaillant, numismate français qui effectua des voyages dans divers pays pour récolter des monnaies destinées au Cabinet des médailles de Louis XIV. En juin 1675, Wheler rencontre à Venise le Docteur Jacob Spon avec lequel il voyage en Grèce et dans les pays du Levant (1675-1676), en compagnie également de quelques marchands anglais de Smyrne et du Docteur Pickering, médecin attaché à leur comptoir. Le Docteur John Covel se joint à eux pour une partie de ce périple. À Constantinople, le groupe de voyageurs est également en contact avec le marquis de Nointel, ambassadeur français. Dans son journal, Wheler s’intéresse aux antiquités grecques, en particulier celles d’Athènes, ainsi qu’à la numismatique et la botanique. Revenu en Angleterre en 1676, il est anobli en 1682 et entre dans les ordres l’année suivante. Il meurt à Durham en 1723.

 

Texte français (traduit par Jean-Pierre Grélois) :

Mais tandis que nous étions dans ces doutes, il arriva que certains de nos marchands anglais, qui étaient venus de Smyrne pour avoir audience auprès de l’ambassadeur, étaient prêts à retourner là-bas. De sorte que nous résolûmes soudain à saisir l’occasion de leur compagnie et de voir ces parties de l’Asie, ne doutant pas que nous pourrions de là-bas trouver une occasion de passer en Grèce selon notre désir. Et ainsi en bonne compagnie du Dr Pickering, médecin de la factorerie de Smyrne, du Dr Covel qui nous fit l’amitié de nous accompagner sur une partie du trajet, et de divers marchands. Nous fîmes bourse commune pour prendre une barque et partîmes d’ici vers midi, le 6 [16] octobre [1675].

Le premier village devant lequel nous passâmes après Chalcédoine était Phanari, juste à l’extérieur du promontoire asiatique de la Propontide, tandis que l’autre [Phanari] est sur le Pont-Euxin. Il y a un écueil sur lequel est placé le piédestal d’une colonne, comme celui de la colonne de Pompée, ce qui montre que les deux n’ont été placées que pour constituer un amer. Un peu plus loin, à l’extérieur du Bosphore en se dirigeant vers le sud-est, nous laissâmes à main droite l’île de Prôtè où se trouvaient les navires vénitiens qui nous avaient amenés, n’osant pas s’aventurer dans le port de Constantinople à cause de la peste. Un peu plus loin nous laissâmes une autre petite île appelée Antigonè et, non loin de là, une autre, estimée à 18 milles de Constantinople, appelée Chalkè où nous passâmes la nuit. Aussitôt que nous eûmes posé le pied sur l’île, le Dr Covel et moi montâmes au sommet de la plus haute colline pour examiner les autres [îles] tout autour et voir si nous pourrions trouver quelques traces des mines d’or qui s’y trouverait, prétend-on. Mais à leur place nous ne trouvâmes que des rochers couverts de Stœchas arabica, myrte, arbousier et ciste femelle, ciste à ladanum. Les îles qui sont autour de celle-ci sont les suivantes : Prôtè et Antigonè au nord, Oxeia et Platys au nord-ouest, appelées ainsi par les Grecs parce que l’une est pointue et que l’autre est basse et plate. Au sud se trouvent deux autres petites îles, l’une appelée Prigkipos qui est la plus grande, et une autre à proximité, appelée Epiti, dans le passé Pitys.

Les îles se trouvent à l’entrée d’un golfe, appelé jadis Astacenus Sinus, aujourd’hui [golfe d’]Izmit, d’après une ville [située] à son fond et portant le même nom, mais anciennement appelée Nicomédie. Il y a à Chalkè un village et deux monastères Nous séjournâmes à celui du côté ouest de l’île et fûmes bien reçus par les caloyers. Ce monastère qui était en ruine fut rebâti par un certain Panagiôtès, naguère drogman du Grand Seigneur. Il était en une telle faveur auprès du [sultan] qu’il obtint de nombreuses bontés pour ses coréligionnaires chrétiens, en particulier la garde du Saint Sépulcre à Jérusalem. Mais il garda cela secret jusqu’à sa mort parce que, pensent certains, il craignait les mauvaises pratiques de l’Église romaine qui a deux couvents à Constantinople, l’un de jésuites et un autre de franciscains, qui se disputent (?) au point de rendre incapable cette Église qui n’aurait jamais souffert avec patience une si grande perte. [Panagiôtès] gît là enterré et a un monument avec une épitaphe désignant ses fonctions.

Il y a aussi ici la tombe de Sir Edward Barton, ambassadeur auprès de cette Cour au temps de la reine Elisabeth.

Le lendemain nous partîmes de là tôt le matin et, en laissant à main gauche les îles d’Epite et Pringkipos, nous arrivâmes à l’autre promontoire du golfe d’Izmit, que Ptolémée semble avoir appelé Posidonium Promontorium.

Texte anglais : George Wheler, A Journey into Greece, In company of Dr Spon of Lyons, In Six Books, Londres, 1682, t. III, p. 212-213.

Book III: A Voyage through the Lesser Asia

[...] But whil’st we were in these doubts, it happened, that some of our English Merchants, that came from Smyrna to wait on the Ambassadour at his Audience, were ready to return again thither. So that we suddenly resolved to take the Opportunity of their Company, and see those parts of Asia ; not doubting, but from thence we might meet with an Opportunity according to our desire, to pass into Greece. And so in the good Company of Doctor Pickering, Physician to the factory at Smyrna, Dr. Covel, who was so kind as to bring us some part of the way, and divers Merchants ; we made a common Purse, taking a Barque among us, and parted hence about Noon, October the Sixth.

The first Village we passed by after Chalcedon, was Phanari, just without the Asian promontory of the Propontis, as the other is of the Euxin Sea ; and hath a Rock lying before it, on which is placed a Pedestal of a Pillar, like that of Pompey’s Pillar : which shews them both to have been set there only for a Sea-Mark. A little further, without the Bosphorus, steering South-East-wards, we left at the right hand the Island Prote ; where the Venetian Ships, we came in, lay, not daring to venture into the Harbour of Constantinople by reason og the Plague. A little further we left another little Island, called Antigoni ; and not far thence another, esteemed about eighteen Miles from Constantinople, called Chalcis, where we lodged that Night. Dr. Covel, and I, as soon as we set footing on the Island, went on the top of the highest Hill, to view the others round about it, and to see if we could find any marks of the Gold Mines they pretend to be there ; but instead of them, found only Rocks cover’d with Stœcas Arabica, Myrtles, Arbutus, and Cistus Fœmina, Leidon. The Islands that are about it, are these, Prote and Antigoni North, Oxya and Plate North-West, called so by the Greeks, because the one is pointed, the other low and plain. South of it, are two other little islands ; the one called Principe, which is the biggest ; and another little one by it, called Epiti, in times past Pitys. These Islands lie at the mouth of a Bay, called formely Astacenus Sinus, now ishmit, from a Town, at the bottm of it, bearing now the same name, but was called antienly Nicomedia. There is a Village, and two Convents in Chalcis. As that on the Wesren-side of the Island we lay, and were well treated by the Caloyers. This Convent being ruined, was rebuilt by one Panagiotes, not long since Druggerman to the Grand Signior ; and so much in his favour, that he obtained many Kindnesses for his Fellow-Christians of the Greek Church ; as the repairing several of their Churches and Monasteries, especially the keeping of the Holy Sepulcher at Hierusalem. But this he kept secret until he came to die, because, as some think, he feared the ill Practices of the Roman Church ; who have two Convents at Constantinople, one of Jesuits, and another of franciscans, lying at lurch to sisable that Church, and would never have patiently suffered so great a loss. He lieth buried here, and hath a Monument with an Epitaph, exressing his Office.

Here is also the Tomb of Sir Edward Barton, Ambassadour to this Court in Queen Elizabeth’s days.

The next Morning early we parted thence, and leaving the Islands Epite and Principe on the left hand, we arrived at the other promontory of the Gulf of Ishmit.